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Acheter des articles en cuir pour l’équipement de la personne produits en France et en Europe n’est pas un acte irresponsable.
Même si la transformation de la peau animale « déchet » de la filière alimentaire pour être valorisée en cuir entraine des consommations d’énergie, d’eau et de produits chimiques, c’est le cas de presque toutes les matières naturelles employées pour l’équipement de la personne, de la maison ou pour la construction.
En Europe, la filière cuir s’est organisée en voie de progrès pour améliorer l’impact environnemental et social. Sa bonne santé financière est nécessaire pour permettre d’investir dans les améliorations qui la rendront encore plus vertueuse.
Car le cuir a pour principal atout d’être plus durable que les matériaux alternatifs naturels ou synthétiques si la conception de l’objet par le maroquinier permet de facilement l’entretenir et le réparer.
Valorisation d’un déchet
Contrairement aux reptiles et espèces exotiques, les bovins, ovins et caprins comme de nombreuses espèces de poissons sont élevés essentiellement pour en consommer la viande ou la chair.
L’impact environnemental et le bilan carbone défavorables de l’élevage sont connus, il est vital de réduire la consommation de viande et de poisson par habitant. Toutefois, en Europe de l’Ouest, la consommation de viande bovine est en repli depuis la fin des années 90, alors qu’elle continue de croitre sur le plan mondial.
Les espèces bovines pèsent pour le quart de la consommation française de viande, loin derrière les porcins 35-40%, et les volailles, pour environ 33%.
Source 2023 ministère de l’Agriculture.
Mais les peaux de porc et de volaille étant généralement consommées en France, elles sont peu transformées en cuir.
Les ovins, caprins et équidés ne pèsent que pour 3%. Ce sont les espèces bovines à viande qui sont la source majeure de production du cuir en France et en Europe.
On peut prédire que la filière cuir européenne contrainte et forcée suivra la tendance baissière de l’élevage pour la viande sauf à importer au-delà de l’Europe. Mais des progrès sont possibles, puisque seulement 10% des peaux de bovins sont valorisées en cuir en France.
Il faut donc poursuivre les améliorations de cette filière en termes d’impact environnemental et social, mais investir dans un contexte d’activité en baisse sera difficile.
Pour les industriels et les artisans qui transforment le cuir, il faut veiller à concevoir puis produire des articles plus réparables et plus durables, en espérant que l’acheteur d’articles en cuir soutienne la demande et délaisse les articles bas de gamme qu’il faut renouveler fréquemment notamment ceux d’importations extra européennes.
La transformation des peaux en cuir consiste donc à recycler et valoriser ce qui constitue un déchet, même s’il est vrai que le tannage consomme de nouvelles ressources chimiques, naturelles (eau) et énergétiques ne serait-ce que pour les transports.
Pour ces raisons, il serait donc faux de prétendre que le cuir est un matériau totalement écologique.
Un atout majeur, la durabilité
Ce qui est juste en revanche, c’est que mis en balance avec d’autres matériaux alternatifs d’origine naturelle ou synthétique qui remplissent la même fonction, le bilan environnemental du cuir est loin d’être défavorable.
L’atout majeur du cuir est lié à sa durabilité.
S’il est entretenu, un article convenablement fabriqué sera réparable et durera tout une vie.

Recyclage après tannage
En France et dans la plupart des pays européens, les entreprises payent et doivent collecter leurs déchets après les avoir triés selon leur nature et leur dangerosité pour l’homme et l’environnement.
C’est naturellement le cas des entreprises qui travaillent le cuir, tant en tannerie qu’en aval les chutes de découpe sont de plus en plus réemployées après transformation, majoritairement par déchiquetage puis agglomération à des polymères.
Le nouveau matériau obtenu est réemployé par la filière cuir pour en faire des renforts. Les premiers procédés existent depuis les années 40. Plus récemment se sont développés de nouveaux matériaux sans apport de produits de synthèse car le cuir contient encore beaucoup de matières après tannage qui ont un fort pouvoir agglomérant.
Celles-ci sont valorisées dans des processus par voie sèche ou humide avec ou sans l’apport d’autres fibres naturelles.
Biodégradable, le cuir ?
Pas vraiment: deux grands et principaux procédés de tannage existent le tannage végétal et le tannage minéral, voir l’article Tannage végétal versus minéral.
Le tannage végétal a recours à des tannins d’origine végétale comme son nom l’indique. Dans ce cas, à condition que le cuir ne soit pas revêtu d’une épaisse couche de finition, le cuir tannage végétal est biodégradable.
Mais ne rêvons pas: cela ne pèse que 10 à 15 % de la production mondiale de cuir. Dans 85% des cas restants, les articles en cuir contiennent de nombreuses substances qui ne peuvent faire l’objet d’un abandon sans retraitement.
Dans les faits, on ne peut donc pas affirmer que le cuir est biodégradable, et d’ailleurs, son principal atout étant la durabilité, on comprend bien que cela est incompatible avec la notion de dégradabilité…
Standards environnementaux
Les tanneries européennes sont tenues par un cahier des charges qui est devenu très strict (Réductions drastiques des consommations d’eau, d’énergie et de produits chimiques, recyclage des flux, préservation de la santé des opérateurs).
Il faut maintenir et renforcer ces contraintes mais comme pour les éleveurs et agriculteurs, il est nécessaire que l’activité demeure économiquement viable pour accompagner l’évolution et continuer d’investir.
La plupart des tanneries européennes sont déjà labellisées ce qui garantit à la fois l’origine géographique des peaux, l’encadrement des processus de transformation et leur traçabilité. (Europe: Label « Made in green » = extension de l’Oeko-tex au cuir, « Naturleder », …, Monde: « Leather Working Group »).
Sélectionner des cuirs issus de ces tanneries labellisées en tenant compte de la proximité du lieu d’élevage puis de production du cuir et de sa transformation garantit un impact social et environnemental limité, d’autant qu’elle restreint les distances de transport.
J’expose mes choix à ce sujet dans la rubrique Qui je suis si vous souhaitez en savoir davantage.
Sensualité
Le contact sensuel, le touché incomparable et chaleureux du cuir apportent un plaisir égal à celui qui fabrique et à celui qui l’utilise, c’est une matière qui procure de l’émotion, et même si c’est sans rapport direct avec notre Environnement, cela fait du cuir une matière sans égal.